J’aurais aimé pouvoir choisir ma destinée. Choisir quel trait d’ADN je voulais et de quel parent je le voulais. Par contre, la vie ne fonctionne pas comme ça. J’ai donc hérité de l’anxiété par excellence, de mon père.
Souvent, les gens ne voient pas la différence entre le stress et l’anxiété. Laisse-moi t’expliquer. Le stress, c’est d’avoir peur de se faire piquer par l’abeille qui est présente à un certain moment, dans l’environnement près de toi. C’est une peur raisonnable, qui existe. L’anxiété, c’est d’avoir peur de l’abeille qui n’est pas là, près de toi. Tu comprends?
J’ai été diagnostiquée avec de l’anxiété généralisée à haut niveau il y a un an. Par contre, tout a commencé bien avant… On ne me comprenait tout simplement pas.
Du plus loin que je me souvienne, j’avais environ 8 ans. Chaque petit détail qui n’était pas calculé dans ma journée me faisait paniquer. Plus les années avançaient, plus je me disais qu’avec le temps, j’allais apprendre à la gérer. Mais à gérer quoi, justement? Ma routine? Ma crainte de la nouveauté?
Ce ne fut qu’une bombe à retardement. Quelques années plus tard, en avril de mon secondaire 2 précisément, mes parents se sont séparés. C’est une étape de la vie qui affecte la vie de tout le monde, pas juste moi.
Mais dans mon cas, ce fut une séparation malsaine qui m’a éveillé beaucoup d’incertitudes. Il y a des secrets familiaux qui ont refait surface. Je dirais que cet événement fut la goutte de trop. La goutte qui a tout fait déborder.
La gradation de mes crises a commencé à ce moment. Les crises devenaient de plus en plus grosses, de plus en plus fréquentes et de moins en moins faciles à gérer. Je me sentais comme un fardeau pour les autres autour de moi.
Le système de santé et services sociaux est devenu une partie de mon quotidien. Après plusieurs essais avec différents psychologues pour trouver des astuces pour détecter les crises et les gérer (dont la méditation, la lecture, l’écriture, le sport, le dessin et beaucoup d’autres), rien n’était assez efficace pour gérer la peur, l’angoisse, la panique et la boule dans la poitrine que j’avais chaque fois.
Plus les jours, les semaines, les mois, les saisons et les années avançaient, pire c’était. Nous n’avons donc pas eu le choix de se diriger vers la médication qui était, à l’époque, notre dernière option. L’option que je redoutais le plus, mais la seule option qui nous restait. La médication, c’était finalement accepter, admettre, que j’avais une difficulté, un problème. Que je n’étais pas normale, quoi. C’est un deuil à la vie, dans la vie de tous, la vie dite normale.
Nous avons commencé avec une médication qui était seulement au besoin. Mais le besoin était trop grand, alors ce fut sans succès. Nous avons donc débuté une dose quotidienne, à faible dose. Sans succès. Nous avons augmenté la dose… et encore… et encore. Aujourd’hui, ça fait maintenant un an que je prends une médication régulière, continue, qui fonctionne. Je commence enfin à pouvoir sortir la tête de l’eau. Mais il m’arrive que la boule revienne. Parfois, un peu plus grosse, un peu plus envahissante.
La médication, ce n’est pas tout. Il faut se faire confiance et prendre sa vie en main lorsqu’une personne, une chose, une routine, nous nuit ou est malsain et ne nous aide pas dans notre difficulté.
Dernièrement, je me suis sortie d’une relation qui au début était merveilleuse et même rêveuse. On appelle ça comment? De la manipulation? Cette relation a fini par me dégrader et m’affecter grandement. Les crises avaient repris, trop souvent. J’ai finalement réalisé que ce n’était pas bien pour moi et que parfois, en jouant les mauvaises cartes, on finit par nous nuire à nous-mêmes. Maintenant que je suis sortie de là, je reprends du bon. Du positif. Je peux finalement recommencer à me sortir la tête de l’eau et voir la vraie vie.
Et puis, bang! Covid-19.
Cette pandémie, qui fait angoisser tout le monde, prend une tournure encore plus grande pour nous, mon anxiété et moi! Je n’arrive pas à voir le bout du tunnel. Y’a pas de date de fin, les informations quotidiennes sont changeantes, stressantes. Ce n’est pas très sécurisant pour quelqu’un comme moi. Je trouve ça difficile d’être là, seule à moi-même, dans cette pandémie. Moi, la fille qui peut faire du 60 heures par semaine, ce qui m’aide à ne pas laisser mes pensées m’envahir. Eh bien là, je dois être chez moi seule, avec moi-même, sans personne à aller voir, sans nulle part où aller pour me sauver de ces pensées qui m’envahissent chaque jour. Ces pensées qui me disent qu’on n’en finira jamais, que cette pandémie durera pour toujours…
Alors s’il-te-plaît, si toi, ça ne te stresse pas tant, que tu n’es pas malade, que t’as pas peur d’être malade, pense un peu aux autres, à ceux qui ont un système immunitaire plus faible, mais également à ceux qui, comme moi, ont une anxiété plus grande et que ça affecte un peu plus.
Reste chez toi et écoute les consignes des figures d’autorité STP!
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Evy. – collaboratrice ponctuelle
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