L’afficheur affichait ton nom, mais il n’y avait aucun son au bout du fil. J’entendais ton chagrin, un cri étouffé, ton corps qui cherchait l’air et ta douleur qui gémissait. Tous ces sons n’étaient que le chaos de ta quête momentanée de survie. Impossible de parler, juste de pleurer. Ça a duré un moment, soit l’espace d’un désarroi. Enfin, l’aveu fût marmonné: il venait de recevoir sa date de péremption. Le poignard était planté. On t’a volé ton bonheur heureux.
Rapidement, la colère, l’incompréhension et les larmes ont fait leur tango de commotions longtemps et pendant plusieurs temps longs, provocants un immense trou de douleur dans ton cœur. Trop d’interrogations et qu’une seule question: Pourquoi?
Cette hargne qui ne t’appartient pas, elle t’habite et te rabâche, tel le grondement d’un moteur de Boeing, prenant racine dans tes tripes pour s’ascensionner jusque dans ta matière grise, en t’implorant de tout fracasser impulsivement. Le raz-de-marée de rafales d’émotions s’en est suivi et le déchaînement de leur opus tout autant; soit une querelle de délire émotionnelle à t’en disloquer les idées.
D’antérieurement jusqu’à veiller sur ton avenir futur, pour toi, depuis toujours, il a été là. À tes yeux, il est le plus fort. Ses bras sont les plus consolants. Sa voix réconfortante n’a jamais eu besoin de te donner des conseils pour faire son œuvre. Le nombre de moments doux qu’il a déposés dans ta boîte à souvenirs sont aussi nombreux que le nombre d’étoiles que l’on retrouve dans la voie lactée… ou dans ses yeux lorsqu’il évoque ton nom. L’héritage du regard qu’il porte sur toi, tu l’as acquis et le répètes sur ta propre destinée. Tout de lui est en toi.
Quant à toi, les réjouissances que tu lui as procurées sont immensurables; tu fais déborder sa boîte à fierté. La joie s’empare de lui lorsqu’il témoigne de toi. Il s’émerveille d’être aux premières loges de ta vie pour applaudir sa plus grande richesse: sa propre destinée.
Garde toujours en mémoire que tu es sa plus belle réussite, sa plus belle saison, son rayon de soleil, sa plus grande fierté, sa raison de se battre, son accomplissement, son bonheur, la plus belle chose qui lui soit arrivée: sa fille. Garde toujours en mémoire que tout de lui aime tout de toi.
Et puis, viendra cette date, cet automne sans lui. Je sais que tu as peur de cet instant amer où le présent se métamorphosera en bourreau pour ne faire de lui qu’un souvenir appartenant au passé. Le vieux poignard planté t’achèvera. Je te relèverai, j’essuierai tes larmes, j’étoufferai ta peine et s’il le faut, je recollerai les feuilles mortes aux branches pour que cet automne ne vienne jamais. J’affronterai moi-même tes combats pour que tu n’aies pas à penser à tes demains sans lui et ainsi retrouver un sens à tes idées disloquées maintenant inéclairées. J’irai te chercher jusque dans les abîmes des dégâts de cet atroce poignard et si je n’arrive pas à te ramener, j’y resterai avec toi pour ne pas t’abandonner.
Lorsque le printemps reviendra et que l’accalmie te permettra de voir à travers l’agitation de tes brouillards, lorsqu’il y aura un peu de soleil dans tes pluies, lorsque ta plaie se fermera tranquillement, lorsque la brûlure de ta rogne trop longtemps habitée s’apaisera, lorsque tu retrouveras lentement la force de chasser ta révolte, alors à ce moment, je retrouverai les mots pour te faire rire et te remémorerai que tout de lui aime tout de toi.
Jass.
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