Je crois qu’on l’a su au premier regard, à la première rencontre. Les jeux étaient faits. Le premier sourire qu’on a échangé est venu tout ébranler. Le déclic que j’ai vu dans tes yeux et que tu as vu dans les miens. Le voyant rouge qui s’allume. Le danger, l’interdit. Le fantasme qu’on n’osait pas prendre pour réalité, était maintenant à portée de main. Se remettre en question, tout remettre en question. Et si j’y allais? Et si je succombais?
Cette tension plus que palpable quand on est dans la même pièce. L’impression que tous les autres sont de trop. L’envie de s’enfuir et de s’enfermer seuls. Se nourrir de l’envie qui nous consume. Se contenir pour faire durer le plaisir. Laisser monter le désir jusqu’à en souffrir. Frissonner en ta présence. Perdre tout contrôle quand tes yeux se posent sur moi. Le son de ta voix qui me perturbe. La chaleur qui monte un peu plus chaque fois. L’envie. Le besoin de te toucher, de te frôler. L’extase si près et si inaccessible à la fois. La conviction que c’est mal. Le mal qui met encore plus le feu à nos pensées.
J’ai résisté autant que j’ai pu. Même si la nausée me prenait à chaque refus. Bien agir au nom de quoi? Piler sur ses désirs pour faire plaisir à qui? Certainement pas à nous. J’en suis venue à la conclusion que l’interdit, l’immoralité t’amusaient autant que moi. Foncer tête baissée. Risquer gros pour effleurer ta peau. Sentir ton souffle chaud. Douter. Être terrorisée. Terrorisée de voir jusqu’où cette passion peut nous mener. Terrorisée que la supercherie soit révélée au grand jour. Devoir avouer qu’on a été faibles. Que cette chimie a été plus forte. Qu’elle a eu raison de nous. De notre raison. De notre morale.
Planifier cette trahison pendant des semaines. Prévoir l’irréparable. Angoisser à l’idée d’y arriver. Redouter l’étape finale de la mise en scène de notre intérêt. Avoir peur que ça détermine la fin ou pire encore la continuité de ce petit jeu malsain. Voir le mur arriver et foncer quand même. Jouir de chaque pas qui nous rapproche de cette rencontre dangereuse. Chaque pas l’un vers l’autre qui nous éloigne un peu plus du bon, du juste.
Tout renier, tout laisser derrière. Juste toi et moi. Juste nous. Nous et cette pulsion qu’il faut assouvir. À tout prix, de tous les moyens possibles. Consommer l’interdit pour retrouver nos esprits. Vivre dangereusement pour y voir plus clairement. Une fois nos bas instincts assouvis, arriverons-nous à départager corps et cœur? Ou continuera-t-on à s’entremêler? Pourrons nous ranger cet épisode derrière nous et aller de l’avant? Ou allons-nous créer un précédent qui nous poussera à y retourner sans cesse? Créer un besoin mutuel de se trouver en la présence de l’autre.
J’ai beau chasser les papillons, ils reviennent toujours. Comme s’il y avait un trou béant dans mon filet. Un trou béant dans mon cœur qui ne demande qu’à être comblé par une envolée. Combler le manque par cette sensation indescriptible qui nous unit. Arrêter de se battre et faire fi des conséquences de nos actes. Et au pire on s’aimera…
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A.
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