Et maintenant, j’ai peur que tu aies un foutu cancer et que je ne le sache pas. J’ai peur que tu meures et que tu ne me le dises pas. Mais je suis beaucoup trop orgueilleuse et trouillarde pour te le dire. J’ai trop peur que tu rejettes mon amour. Je suis beaucoup trop fière pour admettre que tu avais raison. Pour m’excuser en premier. C’est vrai que j’ai mal agi. Je voudrais te dire que j’ai changé, que ça n’arrivera plus, mais je ne me fais pas encore assez confiance pour te faire ce genre de promesse. Et te perdre encore parce que je ne suis pas à la hauteur.
Tes mots m’ont blessée, choquée, parce qu’ils étaient vrais. Je suis désolée d’avoir été tellement touchée dans mon ego que je n’ai pas su comprendre que tu disais ces horribles choses parce que tu m’aimais. Parce que tu n’en pouvais plus de me voir me détruire comme ça. Parce que tu n’arrivais plus à supporter le mal que je faisais à moi et aux autres. Que mon besoin d’amour était devenu plus important que tout. Tu as surement eu peur d’y passer toi aussi. Tirer la plogue avant que je te tasse. Au fond, on est pareilles toutes les deux. Incapables d’aimer sainement. En fait, moi je n’y suis toujours pas parvenue. Toi tu y es peut-être arrivée. Je ne sais pas. Je te le souhaite.
Ce que je sais, c’est que tu as laissé un grand vide dans ma vie. Tous ces souvenirs avec lesquels tu es repartie. Comme si tout ce qui te concerne n’avait plus le droit d’exister en ton absence. De longues années de vie effacées, condamnées par notre bêtise. Notre amour malsain. Je le sais qu’on s’aimait mal, qu’on s’aime toujours. Mieux j’espère. Je pense à toutes les années qu’on perd. À tous les événements qu’on ratera mutuellement dans nos vies. On s’étais promis d’être toujours là l’une pour l’autre. Comment nos différences ont-elles pu nous diviser à ce point? Un jour, tu auras des enfants et je ne serai pas là pour le vivre avec toi comme tu l’as vécu avec moi. Les miens grandissent sans ton amour et ça me tue de leur en priver.
Tant de temps à jongler entre te demander de revenir ou continuer sans toi. Je voudrais que tu voies la personne que je deviens. Que tu sois fière. Je voudrais que tu sois là pour me botter le cul quand je m’effondre, quand je joue la victime. J’ai encore besoin de toi. J’y arrive seule, je m’en sors bien je crois. Mais c’est étrange sans toi à mes côtés. Il y avait tellement plus de couleurs quand tu étais là. C’est comme si une partie de moi n’y était plus. Comme si le passé n’avait pas survécu à nos vies d’adultes. Comme si les deux ados volages et insouciantes qu’on était n’avaient pas su accorder leur personnalité de grandes personnes. Comme si toutes les tempêtes qu’on avait traversées avaient finalement eu raison de nous. Notre amitié avalée par le dernier raz-de-marée. Et rien ni personne n’a pu recoller les morceaux.
Je crois qu’il est trop tard pour ça en fait. Accepter que cette histoire, notre histoire, appartient au passé et chérir nos souvenirs, c’est tout ce qu’il nous reste. Vivre de nostalgie des belles années où nous étions une paire. Inséparables. Accepter qu’on ne soit plus là et que tout arrive pour une raison. La fin d’une chose pour permettre à une autre de vivre. Se séparer pour s’épanouir.
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A.
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