Dur de vivre et d’avancer avec ce boulet accroché aux chevilles en permanence. D’aussi loin que je me rappelle, j’ai toujours entendu cette petite voix qui me disait que je n’étais pas à ma place dans tout ce que j’entreprenais. À l’époque, je n’en étais pas consciente, ce n’est que très récemment que j’ai pu mettre le doigt sur le bobo. J’ai le sentiment d’imposteur dans ma vie en général.
Petite, quand je pratiquais un sport, danse, patin, gymnastique, je ne me sentais jamais à la hauteur. Toujours trop grande, aucune coordination et aucun plaisir. Sauf en natation, où je me suis découvert un certain talent et encore là… J’ai décroché quand on est arrivé aux compétitions. Un certain talent, oui, mais pas assez pour compétitionner contre des gens bien meilleurs que moi. En vieillissant et en apprenant à me connaître, j’ai compris que je n’étais vraiment pas dans la performance et la compétition. Alors oui, peut-être que je n’étais pas à ma place dans le sport.
Mais ce sentiment a continué de me suivre dans d’autres sphères de ma vie. À l’école, je n’ai jamais compris pourquoi j’évoluais dans un programme d’enrichi alors que j’avais des résultats plus que moyens. Bien que j’eusse le potentiel d’en faire beaucoup plus. Encore mon manque d’intérêt pour la performance, une forme d’auto-sabotage ou un manque de confiance en moi? Je n’en sais rien. Pourtant, aujourd’hui, je suis amplement capable de parler de mes forces et de me reconnaître à ma juste valeur. Mais toujours cette petite voix qui persiste et qui me fait douter sans cesse.
Sur le marché du travail, même scénario. Malgré des emplois ou j’ai été valorisée et reconnue pour mes compétences, toujours ce doute. Mais qu’est-ce que je fais ici? Comment a-t-on pu me donner toutes ces responsabilités, cette confiance? J’aborderais bien aussi la maternité, mais comme 99% des mères passent leur temps à douter de leurs compétences, je considère seulement que je fais partie de ce nombre et que c’est la normalité. Toutes les mamans se demandent si elles sont à la hauteur de la tâche, je n’échappe pas à la règle.
En ce qui à trait à l’amour, il y a chez moi cette double polarité où je me sens autant imposteur dans le célibat que dans la vie conjugale. Comment se fait-il que je sois seule alors que je possède autant de qualités qui feraient de moi l’amoureuse idéale? J’ai tant à offrir, quel beau gaspillage. Je ne suis pas faite pour le célibat et pourtant, quand on m’aime, je n’arrive pas à comprendre pourquoi. Je ne saisis pas comment une personne aussi bien peut vouloir de moi. Comme je me sens à ma place ni en célibataire ni en couple, je choisis habituellement des relations nébuleuses et malsaines. Beaucoup plus confortables pour quelqu’un qui, de toute façon, ne se sent à sa place nulle part.
Mais depuis un an, est arrivé dans ma vie quelque chose qui me réconcilie un peu avec ce sentiment d’imposture. L’écriture. Qui au début, était selon moi la chose que j’ai faite pour laquelle j’étais le moins qualifiée. Mais j’ai continué parce que j’aime ça et que ça me fait un bien fou. J’ai passé par-dessus le fait que je ne me sentais pas à la hauteur de cet art (moi, la personne la moins artistique au monde) et j’ai foncé. Et j’ai bien fait. Chaque fois qu’on me parle de mes textes, j’en ressens une très grande fierté. J’ai enfin trouvé un endroit où je n’ai pas besoin d’être performante pour m’y sentir bien. Je n’ai qu’à suivre mon cœur et mon intuition.
Est-ce la peur qui m’a bloquée toutes ces années ou simplement le fait de ne pas avoir trouvé ma place avant? Une chose est sûre, l’écriture m’a aidée à faire la paix avec ce sentiment d’imposteur et à continuer d’avancer. Même si ma tête me dit que je n’ai pas la capacité de ci ou de ça, maintenant, je fonce.
A.
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