Ma sœur et moi ne pourrions pas être plus différentes. Elle, elle a toujours été calme et posée, elle a toujours fait des choix raisonnables pour préparer son futur. Moi, c’était tout le contraire; depuis que je suis très jeune, je suis impulsive, extravertie, un peu trop directe et je déplace beaucoup d’air. Tout au long de mon primaire, les gens me qualifiaient de petit monstre. Puis, lorsque j’avais 9 ans, ma petite sœur, ce petit ange, est venue au monde.
Étonnamment, ce n’est qu’aujourd’hui que je remarque à quel point il y a toujours eu une légère compétition malsaine entre nous. Pourtant, avec presqu’une décennie qui nous sépare et avec les nombreuses différences dans nos personnalités, c’est peu probable de pouvoir se comparer, mais on le fait. En fait, tout le monde autour de nous nous l’a toujours un peu fait sentir aussi… Comme dans toutes les familles normales j’imagine, on a toujours entendu ce genre de commentaires:
«Agis donc un peu plus comme ta sœur.»
«Ta sœur ne dirait jamais ça, elle.»
«Regarde les beaux résultats scolaires de ta sœur.»
Mais je ne suis pas comme elle et elle ne sera jamais comme moi. J’ai mes forces et elle a les siennes et ce ne sont pas du tout les mêmes. Je suis bonne en français et elle en maths, elle est bonne en sciences et moi en arts, alors comment voulez-vous que je fasse comme ma sœur?!
Toute ma vie, j’ai senti une compétition pour avoir la même place qu’elle dans le cœur des gens, de certains membres de ma famille. Je me suis aussi questionnée sur les comportements que j’avais enfant, contrairement aux siens. Notre situation familiale n’était pas la même 10 ans plus tôt, nous n’avions pas non plus les mêmes finances, le même milieu sécuritaire et stable.
Elle, de son côté, sans avoir validé, je suis certaine que la compétition venait aussi instinctivement. Veut, veut pas, elle suivait mes traces qui étaient en montagnes russes parfois, mais qui menaient souvent à de grandes réussites. Je suis convaincue que ça ne doit pas être évident de vouloir réussir comme sa grande sœur. Vouloir aller à la même école privée et ne pas faire la liste, vouloir exceller dans les mêmes domaines sans toujours y arriver. Ça ne fait qu’amplifier notre désir de compétition entre sœurs, comme s’il y avait quelque chose à gagner à la fin et quelque chose à prouver à notre entourage ou à nous-mêmes.
Je le remarque de plus en plus à cause de l’âge où on est rendues. On veut la même chose au final: un amoureux, une maison et des enfants (elle veut un chien et pas moi, mais c’est un détail). Elle, ayant 21 ans et moi ayant atteint récemment le 30, on veut arriver à la même destination. Je me dis souvent qu’étant la plus vieille, ce serait à moi d’y arriver en premier. Pourquoi? Aucune idée, juste pour pouvoir dire que je l’ai atteint avant ma petite sœur de 9 ans ma cadette, je crois.
Je ne dis pas que je ne veux pas tout ça pour ma sœur, je ne dis pas non plus que je ne suis pas heureuse pour elle lorsqu’elle vit des succès. Je serai toujours là pour elle et je ne souhaite que son bonheur. Je dis seulement que parfois, cette compétition se fait ressentir d’un bord ou de l’autre et que ça n’aide en rien à notre relation. Une sœur, je n’en n’ai qu’une et je n’ai pas le goût qu’on perde notre temps à se comparer ou à compétitionner. J’ai appris avec les années que, dans le fond, je n’ai pas envie d’être comme elle et qu’elle ne veut probablement pas être comme moi non plus.
Après tout, ce qui fait la beauté de notre famille, c’est que malgré nos différences, on choisit de rester unies. Maintenant, donnons-nous comme défi de se comparer à soi-même, de mettre l’emphase sur notre propre évolution et sur nos progrès personnels. Voilà tout ce qui importe.
L.
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