Ça commence tranquillement, sournoisement, on ne s’en rend pas compte et peu à peu, ça prend davantage de place dans notre vie. ¸
Je pense que pour moi, la première fois doit remonter en secondaire 3. J’étais en voyage en Espagne avec l’école et un soir, j’ai fait ma première crise d’angoisse, ou du moins les premiers signes d’une éventuelle crise. C’est flou dans ma mémoire. Le mal de vivre, lui, a toujours été un peu présent, en up et down assez prononcés, dès le secondaire.
Je dirais que c’est devenu plus problématique autour de mes 17 ans. Rendue en appartement, je me mettais énormément de pression quant à la notion de réussite. J’ai commencé à faire des crises d’angoisse plus récurrentes sans pouvoir leur donner de nom. Je ne savais pas vraiment ce qu’il m’arrivait. Chaque fois, c’était comme si chaque choix à faire devenait une montagne et ça affectait également mes relations avec les autres. Ma première dépression est également survenue à ce moment de ma vie, après une dure séparation.
Les gens autour de moi me voyaient pourtant comme une personne qui respirait la joie de vivre : je ne partageais pas vraiment les moments où j’aurais renoncé à la vie. À l’aube de mes 20 ans, l’anxiété a pris de plus en plus de place et ma vie a commencé à être de plus en plus handicapée. Périodiquement, je descendais très bas, peut-être trois fois par année, mais c’était toujours pour remonter très haut après. Alors, le soleil au bout du tunnel me maintenait tout de même en vie. Ça, et la peur de faire du mal à ma mère et à mes proches.
À cette époque, j’ai vécu une deuxième séparation qui a été très difficile. Je me rendais compte que je devenais lourde pour mes proches. Je voulais trouver une solution, alors j’ai commencé à voir un psy. Je l’ai vu de début 2012 à début 2015 : on and off.
Ça m’a pris du temps pour mettre des mots sur ce que j’avais. Je me suis tannée à un certain moment et je l’ai prié de me donner un diagnostic. Sa réponse, étant psychologue et non psychiatre, restait, selon lui, que des suppositions, mais ce sont tout de même ses mots précis qui m’ont encouragée à me rendre à l’urgence.
Fin 2014, je faisais une dizaine de crises d’angoisses par semaine et je voulais me tuer aux deux-trois mois. Personne n’était vraiment au courant à part mon copain, maintenant devenu mon mari. À ce moment précis, il a été la main et le support dont j’avais besoin pour faire le saut : me rendre à l’hôpital, demander à voir un psychiatre, attendre des heures, y passer la nuit et finalement voir ce médecin.
Médecin qui me suit toujours aujourd’hui. Ayant passé trois ans à voir un psy, j’ai pu mettre des mots sur ma douleur afin de bien expliquer à ce nouveau spécialiste ce qui se passait à l’intérieur de moi. Je me rappelle qu’à ce moment précis, nous étions en janvier 2015 et je ne voyais plus d’issue. Ayant toujours refusé de prendre des médicaments, j’étais maintenant entièrement ouverte à la solution miracle qu’on allait me proposer. J’étais prête à essayer ce que j’avais toujours vu comme le diable qui allait changer ma personnalité. J’avais peur. Très peur. Mais j’avais épuisé toutes mes ressources et je voulais vivre. Vivre, comme il faut, sans vouloir mourir, sans faire des crises d’anxiété chaque jour.
C’est alors que j’ai commencé à prendre une pilule par jour. Chaque soir, avant de me coucher. Cette pilule remplie de promesses qui devait éliminer tout signe de dépression ou d’anxiété. Au début, on m’a prescrit une dose un peu trop forte. Le temps de m’habituer à cette nouvelle réalité, le temps que mon corps accepte ce nouveau produit. J’ai ensuite tranquillement diminué ma dose à ce que je considérais comme étant correct pour moi, à l’aide de l’avis du psychiatre.
Je fêterai bientôt mes deux ans de médication. Je ne veux pas dire que c’est la solution à tout problème, ni que c’est adapté à chaque personne. En réalité, c’est bien plus complexe comme décision que ça en a l’air. Je ne dirai pas que ça ne m’a pas changée. Oui, ça affecte ma personnalité. Mais je vais tout de même affirmer que cette pilule m’a sauvé la vie et continue probablement de le faire.
Est-ce que je serai médicamentée à vie ? Est-ce qu’un jour j’arrêterai ? Je ne sais pas. Peut-être. Mais une chose est sûre : ce sera difficile tant qu’on vit dans une société aussi folle.
C’est la meilleure décision que j’ai prise à vie. Ça, et épouser l’homme qui m’a soutenue pendant tout ce cheminement. Aujourd’hui, faisant une crise d’angoisse par six-huit mois et n’ayant plus envie de m’enlever la vie, je n’ai jamais été plus heureuse et je me sens enfin stable et prête à réaliser mes rêves les plus fous.
Same.
Moi aussi je l’aime ma petite pillule qui me garde en vie